Le jeudi 30 octobre, la Cour d’Appel de Tanger a rendu un jugement important concernant le milliardaire français Jacques Bouthier, accusé de traite des êtres humains et d’exploitation sexuelle au sein de son entreprise, anciennement connue sous le nom d’« Asso 2000 » et désormais « Villafi ». Cette décision a annulé des condamnations majeures et réduit considérablement les peines par rapport à la sentence initiale de juillet 2024, qui s’élevait à 34 ans de prison.
Détails des jugements d’appel
Le jugement a été rendu en présence des accusés après acceptation de l’appel. La Cour a requalifié plusieurs des accusations, déclarant l’innocence de la plupart des prévenus des charges de traite des êtres humains, y compris des accusations de harcèlement sexuel et de complicité. Les peines concernant le non-dénonciation d’un crime ont été annulées, les preuves étant jugées insuffisantes pour soutenir les crimes majeurs. Néanmoins, certaines infractions mineures, telles que la corruption et l’usage de fausses promesses pour obtenir de faux témoignages, ont été confirmées.
Changements marquants dans les peines :
- Loubna H., accusée principale, a vu sa peine initiale de dix ans réduite à quatre ans, avec une déclaration d’innocence sur les accusations de traite et de non-dénonciation.
- Hamza, son époux, a vu sa peine de six mois confirmée sans changement.
Pour les principaux complices, condamnés initialement à quatre ans chacun, les jugements sont les suivants :
- Rachid M, Iman B, et Zakaria A : acquittement des charges, réduction à six mois de prison avec sursis, et amende d’un millier de dirhams.
- Mohammed Y B et Idriss A : acquittement des charges de traite, condamnés à six mois de prison et amende d’un millier de dirhams.
- Emmanuel F : requalification des charges pour corruption, peine réduite à six mois de prison.
La Cour a également ordonné à tous les prévenus de payer les frais de justice solidairement et a levé des mesures judiciaires provisoires, y compris les détentions préventives. Les accusés disposent de dix jours pour faire appel de cette décision.
Poursuites civiles : Renvoi à d’autres juridictions et réduction des indemnités
Sur le plan civil, la Cour a annulé la plupart des indemnités initialement accordées aux victimes, jugées non compétentes pour statuer sur ces demandes. Les affaires de Mariam A, Samira A, Anas B, Kawtar A, et Ikram A ont été renvoyées à d’autres juridictions, laissant les frais à leur charge.
En ce qui concerne la demande de Rihana A contre la majorité des accusés, la Cour a également jugé qu’elle n’avait pas compétence, renvoyant le dossier aux instances appropriées. Toutefois, l’indemnité accordée à Rihana A contre Loubna Hamiri a été réduite à 50 000 dirhams, la rendant également responsable des frais.
Contexte
Cette affaire a débuté en juin 2022 suite à des plaintes de six anciennes employées de l’entreprise à Tanger, soulevant de vives discussions sur la protection des travailleurs étrangers et marocains au sein des sociétés étrangères, surtout avec l’implication directe de Botet, qui a été absent lors de la majorité des audiences. Le ministère public avait initialement requis des peines de 30 ans pour des motifs de dissuasion, tandis que les avocats des victimes demandaient des indemnités dépassant cinq millions de dirhams, qu’ils estimaient insuffisantes pour compenser les souffrances psychologiques et sociales des victimes.
D’un autre côté, la défense des prévenus a plaidé pour leur acquittement total, arguant que les accusations étaient basées sur des plaintes mensongères motivées par des ressentiments ou des tensions diplomatiques entre le Maroc et la France, maintenant résolues. Un des avocats a appelé à maintenir l’indépendance de la justice pour éviter toute politisation de l’affaire.



